jeudi 16 décembre 2010

Tout ce que j'ai vu a disparu / Images retrouvées


TOUT CE QUE J'AI VU A DISPARU
GALERIE DE L'ÉCOLE SUPÉRIEURE D'ART DE LORIENT
10.11.2010 -17.12.2010
> livret d'exposition



Sans titre / Vis-à-vis © Catherine Poncin / Galerie des Filles du Calvaire

Avec une grande photographie issue de la série Vis-à-vis et la vidéo Mamèr.moi, Catherine Poncin était doublement présente dans cette exposition.
On pourrait considérer son œuvre comme une archéologie dévoyée de l'image. Car il s'agit bien d'une quête des images, mais elle est dénuée de tout désir de conservation. Car Catherine Poncin photographie souvent des photographies comme d'autres collectent des objets laissés à l'abandon auxquels on ne saurait plus accorder le temps d'un regard. Si elle revient sur des images sans qualité c'est pour en saisir un fragment, qu'elle recadre, monte, redistribue dans une nouvelle histoire. Alors que le plus souvent ces œuvres mettent volontiers en relation – et en tension- plusieurs sujets, pour Vis-à-vis, elle ne travaille qu'à l'intérieur d'une seule et même image, amplifiée par la découpe d'un motif, la rupture de l'échelle, la soustraction d'une partie. A partir de photos prélevées dans les albums de familles migrantes qui ont traversé la Méditerranée, Poncin crée ainsi des tableaux fracturés, insinue le trouble, introduit des ellipses, qui mettent en doute la surface calme du souvenir et font resurgir soudain, inaperçue, la figure sans âge de l'enfance perdue. Tableaux de déchirements silencieux, de l'histoire non-dite, histoire de la perte, du déracinement. Comme une mémoire (re)trouvée.


MaMère.moi / Vis-à-vis © Catherine Poncin / Galerie des Filles du Calvaire
Avec Mamère.moi, l'une des rares vidéos de l'artiste, Poncin travaille à l'intérieur de sa propre intimité en fabriquant en seize courtes séquences le portrait de sa mère, Pierrette. En guise de caméra Poncin utilise un appareil photo bon marché. A l'arrivée, le témoignage s'en trouve troublé, déréalisé. Avec ce dispositif frustre – son brut, images pixelisées -, Poncin n'en inscrit pas moins une écriture d'une grande délicatesse. Par un jeu de cadrages très serrés – on n'aperçoit le plus souvent des mains et les motifs d'une robe, une cheville parfois- elle parvient à mettre à distance la dimension proprement documentaire de la vidéo. Nous ne sommes déjà plus dans un film de famille. Il ne reste qu'une succession saccadée de scènes d'épure, sans date et sans lieu, le tête-à-tête d'une mère et de sa fille, qui glisse en prévenir du banal à l'émouvant et de l'émouvant au cruel. Une image intime mais sans propriétaire, un lieu singulier dans lequel nous pénétrons par effraction.

L'un des chapitres de l'exposition Vis-à-vis a été présenté à l'Espace Khiasma à l'automne 2007.
Le film Mamèr.moi y a été projeté en décembre de cette même année.
Il est disponible en DVD aux éditions Incidences
Catherine Poncin est représentée par la Galerie Les Filles du Calvaire (Paris-Bruxelles)

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